Comprendre le droit à l’alimentation

Le droit à lalimentation est un droit humain qui se fonde sur la prémisse que tous les êtres humains doivent pouvoir bénéficier, en tout lieu et tout moment, dune alimentation :

N

en quantité et en qualité adéquates.

N

conforme à leurs besoins, préférences, valeurs et croyances.

N

produite dans le respect de l’environnement et des autres êtres humains.

N

ainsi que physiquement et économiquement accessible.

Car tout le monde mange!

Nous sommes toutes et tous concerné·es lorsque vient le temps de savoir quels pesticides se trouvent dans nos légumes, de pouvoir nourrir nos enfants avec des produits frais, ou de choisir du saumon pêché au Québec et pas ailleurs, par exemple.

Le droit à l’alimentation, c’est quoi

Le droit à lalimentation va bien au-delà des enjeux d’alimentation liés à la pauvreté, qui représentent aussi, bien évidemment, des problématiques de taille. Considérons d’ailleurs que l’insécurité alimentaire touche plus dun million de personnes au Québec, soit une personne sur huit [Statistique Canada, 2022]. Bien quaidantes, les banques alimentaires sont un moyen de dernier recours et non pas une réponse à un problème beaucoup plus large et enraciné.  

 

Le droit à l’alimentation est plus concrètement supporté par:

 

 

Pour en savoir plus sur l’histoire du droit à l’alimentation ➔

 

Les quatre composantes

Le droit à l’alimentation présente quatre composantes tout aussi importantes les unes que les autres, qui doivent être remplies en même temps, pour le bénéfice de tout le monde.

Ces composantes permettent aussi de s’assurer que toutes les conditions de réalisations du droit à l’alimentation sont abordées ensemble, comme un tout indivisible ou
comme un système.

La disponibilité et la stabilité des approvisionnements

En toutes circonstances, nous devons :

N

assurer la constance de l’approvisionnement, de la production, de la transformation et de la distribution des aliments.ouvoir tirer directement son alimentation de la terre ou d’autres ressources naturelles permettant une production autonome ou collective.

N

disposer de systèmes, d’infrastructures et de ressources humaines permettant la production et la transformation, situés le plus près possible des personnes.

N

disposer de systèmes alimentaires capables d’acheminer les aliments du lieu de production à l’endroit où ils sont requis.

N

assurer la constance de l’approvisionnement, de la production, de la transformation et de la distribution des aliments.

Des exemples de mesures à réclamer ou à adopter

  • Plus dautonomie alimentaire au Québec et moins de dépendance envers les importations.
  • Un meilleur accès au territoire nourricier (forêt, lacs, rivières, terres cultivables, etc.) pour chasser,
    pêcher et cultiver sa nourriture.
  • De meilleures conditions de travail pour assurer la relève et le bien-être des personnes qui travaillent
    au sein du système alimentaire : production, transformation, transport, vente, etc.

L’accessibilité des aliments

Nous devons avoir l’assurance : 

N

d’un accès physique, géographique et économique à la nourriture.

N

d’un accès aux moyens de produire, de transformer, de cuisiner et de conserver des 
aliments.

Des exemples de mesures à réclamer ou à adopter

  •  Un revenu viable garanti pour que toute personne puisse se procurer des aliments dans le respect
    de sa dignité.
  • Un soutien au développement de commerces alimentaires abordables dans tous les quartiers, villes
    et villages. 
  • Éviter les déserts alimentaires autant en région urbaine que rurale.
  • Un soutien aux organismes qui facilitent laccès aux aliments et leur préparation ou consommation : cuisines collectives, aide à la préparation de repas, popotes roulantes, etc.

La durabilité des systèmes alimentaires

Nous devons avoir l’assurance que les générations actuelles et futures pourront accéder à l’alimentation dans le respect de l’environnement et de la biodiversité, ainsi que des humains.

Des exemples de mesures à réclamer ou à adopter

  • Un meilleur encadrement des pratiques dans les secteurs de lagriculture, de l’élevage, de la chasse, de la pêche et de la cueillette pour sassurer que ces activités respectent lenvironnement et la biodiversité.
  • Un meilleur soutien à la transition de ces pratiques pour que le fardeau de la transition écologique ne repose pas uniquement sur les personnes qui pratiquent ces activités.
  • Un meilleur encadrement des conditions de travail des personnes qui travaillent dans tous les secteurs du système alimentaire.
  • Un meilleur encadrement des règles d’emballage et de transport des aliments, ainsi que de la gestion des matières résiduelles afin de les rendre plus durables.

L’adéquation des aliments

Nous devons avoir lassurance que notre alimentation répond :

N

à nos besoins biologiques.

N

à nos valeurs personnelles.

N

à des dimensions sociales, culturelles, affectives, spirituelles et environnementales.

N

à la nécessité d’être exempte de substances toxiques.

Des exemples de mesures à réclamer ou à adopter

  • Un meilleur encadrement de lutilisation de produits chimiques dans la production, la transformation
    et la conservation des aliments et laccès à des informations fiables à ce propos.
  • Le déploiement de programmes dalimentation scolaire universels respectueux de la diversité culturelle de la population.
  • Un meilleur accès à des aliments frais, sains et culturellement appropriés dans les diverses communautés. 

Le cadre PANTHER

Parler de droit à lalimentation, cest considérer la sécurité alimentaire avec une approche propre aux droits humains.

Cette approche comprend sept valeurs à mettre en place dans toutes les démarches visant à réaliser un droit humain — et donc à bâtir son cadre juridique.

On peut rassembler ces valeurs sous lacronyme PANTHER, qui reflète les premières lettres de la version anglaise des principes que les gouvernements doivent respecter dans le choix, la mise en œuvre et le suivi des mesures qu’ils adoptent pour réaliser le droit à l’alimentation. 

Les sept valeurs du cadre panther

Participation

La participation repose sur lidée que toute personne, sans exception, a le droit de prendre part aux décisions qui la concernent. Le gouvernement doit donc développer des mécanismes permettant à la population de prendre part à la planification, à la création, au suivi et l’évaluation des lois, politiques ou programmes qui ont un impact sur lexercice de son droit à lalimentation.

Accountability (responsabilité)

La responsabilité signifie que les personnes élues et les fonctionnaires doivent être tenus responsables
de leurs actions.

Par exemple, au moment des élections, lors de procédures judiciaires, etc

Non discrimination

La non-discrimination envers des individus ou des groupes interdit toute différence de traitement fondée sur lappartenance ethnique, la couleur, le sexe, la langue, la religion, lopinion politique, etc. Le gouvernement doit aussi accorder une attention particulière aux personnes dont les droits ne sont pas respectés au même titre que dautres individus. Par exemple, les personnes en situation de handicap ou les personnes historiquement marginalisées (personnes de couleur ou autochtones, femmes, LGBTQ2S+).

Transparency (transparence)

La transparence signifie que la population a accès aux informations nécessaires pour comprendre comment et avec qui le gouvernement prend ses décisions.

Le gouvernement doit s’assurer que la population possède un niveau de connaissances minimum sur les processus de décision. Il doit par exemple diffuser une information claire et compréhensible en utilisant les médias appropriés pour rejoindre l’ensemble de la population (journal, télé, radio, médias sociaux, etc.).

Human dignity (dignité humaine)

La dignité humaine exige que les personnes soient traitées de façon digne. La dignité est un droit absolu que possède chaque personne dès sa naissance. Ce droit fondamental découle du simple fait d’être humain·e.

Empowerment
(pouvoir d’agir)

Le pouvoir dagir individuel et collectif exige que les personnes aient le pouvoir, la capacité, les moyens et les informations nécessaires pour exercer un contrôle sur les décisions qui ont une influence sur leur vie.

Rule of law
(état de droit)

Un État de droit signifie que le gouvernement veille à ce que tout le monde, y compris lui-même et les personnes qui le représentent, respecte la loi et les mécanismes établis pour son application correcte.

La responsabilité de l’État

Lalimentation, en tant que droit, n’est plus seulement un bien commercial, encadré par les règles du marché, mais plutôt un droit fondamental que les gouvernements se doivent de prendre en charge.

Cela pousse le gouvernement à reconnaître les responsabilités qui lui reviennent. Il doit donc tout mettre en œuvre (lois, politiques, programmes, etc.) pour que le droit à lalimentation devienne une réalité. 

Ses responsabilités sont de trois niveaux : 

Respecter, soit ne pas porter lui-même atteinte au droit.

Cela implique que le gouvernement, y compris ses ministères et fonctionnaires, ne prenne aucune mesure qui aurait pour effet de priver quiconque de son accès à lalimentation

Protéger, soit encadrer les activités privées (de personnes ou d’entreprises) pour les empêcher de porter atteinte au droit.

Cela impose au gouvernement dadopter les lois et les règlements nécessaires pour empêcher toute entité tierce de brimer laccès à lalimentation de la population.

Mettre en œuvre, soit adopter des mesures concrètes pour soutenir sa réalisation.

Cela impose au gouvernement d’être proactif pour assurer la réalisation du droit à lalimentation. Cette obligation se divise en deux volets :

— Faciliter : cela impose au gouvernement de prendre les devants en adoptant des mesures concrètes pour créer un environnement juridique, politique et institutionnel facilitant laccès de la population à des aliments adéquats, dans le respect de la dignité humaine.

— Donner effet : cela impose au gouvernement, dans les circonstances où des personnes se trouvent, pour des raisons indépendantes de leur volonté, incapables daccéder à des aliments par leurs propres moyens, de fournir une aide alimentaire ou financière durgence.